Lorsque Moulinkyaputta vint trouver Bouddha pour la première fois, il lui posa plusieurs questions. Bouddha lui répondit : « Me posez-vous des questions pour les résoudre ou seulement pour obtenir des réponses ? »
Moulinkyaputta dit : « Je suis venu pour vous poser des questions et voilà que c’est vous qui m’en posez ! Laissez-moi réfléchir, je dois y penser. » Il réfléchit et le lendemain, dit : « En fait, je suis venu pour les résoudre. »
Bouddha lui demanda : « Avez-vous posé ces mêmes questions à quelqu’un d’autre ? »
Moulinkyaputta répondit : « Je n’ai cessé de les poser à tout le monde pendant trente ans. »
Bouddha répliqua : « L’on vous a sans doute fait de très nombreuses réponses. L’une d’elles a-t-elle été celle que vous attendiez ? »
Moulinkyaputta répondit : « Aucune ! »
Alors Bouddha lui dit : « Je ne vais pas vous donner de réponse. En trente ans, de nombreuses réponses vous ont été faites. Je pourrais en faire d’autres, mais ce serait vain. Je vous donnerai donc la solution, non pas la réponse. »
Moulinkyaputta dit : « Parfait ! Donnez-la-moi. »
Mais Bouddha lui dit : « Je ne peux pas vous la donner ; elle doit naître en vous. Restez avec moi pendant un an en silence. Soyez parfaitement silencieux et au bout de ce temps, vous pourrez m’interroger et je vous donnerai la réponse. »
Sariputra (le grand disciple de Bouddha) était assis sous un arbre à proximité. Il se mit à rire. Moulinkyaputta demanda : « Pourquoi Sariputra rit-il ? Qu’y a-t-il de risible ? »
Sariputra lui dit : « Si vous avez une question à poser, faites-le tout de suite. N’attendez pas un an. On s’est joué de vous, de moi aussi ! Parce qu’au bout d’un an on ne demande plus rien. Si vous restez totalement silencieux pendant un an, le mobile de votre question disparaît. Cet homme vous trompe : au bout d’un an, il ne vous donnera aucune réponse. »
Bouddha ajouta : « Je tiendrai ma promesse Sariputra. J’ai également tenu celle que je vous ai faite. Ce n’est pas de ma faute si vous ne posez plus de questions. »
Une année durant, Moulinkyaputta garda le silence : il méditait en silence, devenant à mesure plus silencieux intérieurement et extérieurement. Il devint comme un lac tranquille, sans vibrations et sans vagues. Il oublia que l’année s’était écoulée. Le jour était venu de poser des questions à Bouddha mais il avait oublié.
Bouddha dit : « Autrefois, il y avait ici un homme du nom de Moulinkyaputta. Où est-il ? Il a une question à me poser. L’année est passée, le jour est venu. » Dix mille moines étaient rassemblés et chacun essaya de savoir qui était Moulinkyaputta, y compris Moulinkyaputta lui-même !
Bouddha l’appela lui disant : « Pourquoi chercher alentour ? Vous êtes l’homme. Et je dois tenir ma promesse. Interrogez-moi et je répondrai. »
Moulinkyaputta dit : « L’entité interrogatrice est morte. C’est pourquoi je regardais autour de moi pour voir qui était Moulinkyaputta. J’ai entendu son nom, mais il n’est plus depuis longtemps. »